ICAN : « L'OTAN escalade la tension nucléaire envers la Russie »

 

Par ICAN (International Campaign to Abolish Nuclear Weapons)

Publié le 16 juin 2024 par ICAN- Traduction libre activista.be

Note :   Le 7 juillet 2017 – après une décennie de plaidoyer par ICAN et ses partenaires – une écrasante majorité d’Etat (122) a adopté un accord historique : le Traité sur l’Interdiction des Armes Nucléaires (TIAN). Le traité est ouvert à la signature depuis le 20 septembre 2017 et est entré en vigueur le 22 janvier 2021, 3 mois après la 50 ème ratification. Il y a actuellement 96 signataires, dont 70 ont ratifié le Traité. Les armes nucléaires sont donc officiellement interdites en droit international. Ce qui est, sans surprise, tu dans les pays possédant ou hébergeant des armes nucléaires, comme la Belgique(1). Les armes nucléaires sont des armes de destruction massive visant avant tout les civils.

 

Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a proféré l'une des réponses nucléaires les plus ouvertes à ce jour face aux menaces nucléaires proférées par la Russie depuis son invasion massive de l'Ukraine. Dans une interview accordée au journal britannique The Telegraph, M. Stoltenberg a déclaré que l'OTAN envisageait de mettre davantage d'armes nucléaires en attente : "Je n'entrerai pas dans les détails opérationnels concernant le nombre d'ogives nucléaires qui devraient être opérationnelles et celles qui devraient être stockées, mais nous devons nous consulter sur ces questions. C'est exactement ce que nous faisons".

Fondant ses arguments sur la doctrine de pseudo-dissuasion que l'OTAN suit avec tous les États dotés de l'arme nucléaire et leurs alliés qui la soutiennent, M. Stoltenberg, qui quittera ses fonctions dans quelques semaines, a ensuite exhorté l'Alliance à utiliser plus ouvertement la donne nucléaire à l'encontre d'autres États : "La transparence permet de faire passer le message direct que nous sommes, bien entendu, une alliance nucléaire. ....  L'objectif de l'OTAN est, bien sûr, un monde sans armes nucléaires, mais tant que les armes nucléaires existeront, nous resterons une alliance nucléaire, car un monde où la Russie, la Chine et la Corée du Nord disposent d'armes nucléaires, et où l'OTAN n'en a pas, est un monde plus dangereux".

Le porte-parole du président russe Vladimir Poutine, Dmitri Peskov, n'a pas tardé à réagir : "Ce n'est rien d'autre qu'une nouvelle escalade de la tension".

M. Peskov a également souligné que les commentaires du chef de l'OTAN semblaient contredire la déclaration faite la veille à l'issue de la conférence de paix sur l'Ukraine en Suisse, selon laquelle toute menace ou utilisation d'armes nucléaires dans le contexte de l'Ukraine était inadmissible.

Alicia Sanders-Zakre, coordinatrice de la politique et de la recherche d'ICAN, a appelé toutes les parties à cesser d'attiser les tensions : "Un jour après avoir critiqué la Russie pour ses menaces nucléaires inadmissibles, le secrétaire général de l'OTAN fait étalage d'une réponse nucléaire. C'est le genre d'escalade dangereuse, inhérente à la doctrine de dissuasion, que ICAN met en garde depuis un certain temps ; les deux parties doivent prendre du recul et réduire les tensions.

Mme Sanders-Zakre poursuit : "Les pays de l'OTAN qui hébergent des armes nucléaires américaines devraient admettre à leurs citoyens qu'ils ont ces armes inhumaines sur leur sol sans qu'ils le disent. C'est le genre de transparence que l'OTAN devrait pratiquer. Ni ces membres de l'OTAN - la Belgique, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas et la Turquie - ni la Biélorussie, qui effectue des exercices nucléaires avec la Russie, ne devraient manifester leur volonté de participer à l'assassinat de millions de personnes.

Les partisans de la doctrine de dissuasion prétendent qu'elle assure la stabilité et maintient la paix, mais elle fait exactement le contraire. Elle encourage la prolifération et l'augmentation du nombre de pays possédant des armes nucléaires, comme le montre clairement le cas le plus récent de la Corée du Nord, ainsi que des engagements armés inconsidérés. L'histoire montre également qu'elle encourage le type de politique de la corde raide dont nous avons été témoins lors de la crise des missiles de Cuba, qui nous a conduits au bord d'une catastrophe nucléaire qui n'a été évitée que par chance.

Les experts nucléaires ont critiqué la rhétorique d'escalade mal pensée de M. Stoltenberg.  Dans le cadre de la crise ukrainienne actuelle, elle accroît les dangers, en particulier pour les populations européennes que des responsables comme le secrétaire général de l'OTAN se sont engagés à protéger.  

Comme l'ont dit les États parties au traité des Nations unies sur l'interdiction des armes nucléaires, la doctrine de la dissuasion est une menace pour la sécurité de tous les pays et un obstacle au désarmement. L'utilisation d'armes nucléaires, et même la menace d'y recourir, n'est pas une chose à faire ou à envisager à la légère, car elle menace les populations civiles du monde entier. Les derniers commentaires de M. Stoltenberg sur le fait que l'OTAN est une alliance nucléaire révèlent clairement que lui, et d'autres qui soutiennent une doctrine de dissuasion dépassée, doivent se rappeler que derrière ces mots se cachent des armes conçues pour causer des dommages massifs aux populations civiles.

 

(1) https://nonukes.be/fr/info-2/en-belgique/

Publication originale sur le site d'ICAN


Cet article est proposé afin d'élargir le champ de réflexion, ce qui ne signifie pas systématiquement caution à l’analyse et aux opinions qui y sont développées. La responsabilité d'activista.be s'arrête aux propos reportés ici. activista.be n'est nullement engagé par les propos que les auteurs auraient pu tenir par ailleurs et encore moins par ceux qu'ils pourraient tenir dans le futur. Merci toutefois de nous signaler toute information concernant l'auteur qui pourrait justifier une réévaluation.