La paix, but ultime de l’humanité


 

 

Par Gabrielle Lefèvre (Journaliste/gauche/Belgique)

Publié le 13 septembre par Entre les Lignes


Nous sommes au bord de l’abîme : telle est la sensation éprouvée par nombre de citoyens lisant les propos de plus en plus guerriers lancés par le président ukrainien V. Zelensky qui veut utiliser des armes occidentales de longue portée pour atteindre des cibles militaires en territoire russe. La Russie avertit : "cela signifiera que les pays de l’OTAN, les États-Unis et les pays européens, sont en guerre contre la Russie".

La menace d’une guerre nucléaire n’a jamais été aussi intense.

Un bon observateur des menaces internationales nous envoie ceci : Appel d'offres du Pentagone pour une étude sur les effets sur l'agriculture d'une guerre nucléaire dans l'ancien bloc de l'Est et au-delà de l'Europe orientale et de la Russie occidentale. Les candidats peuvent postuler jusqu'au 27 septembre. https://sam.gov/opp/505b2b2cb4c140239c054f39ef333f81/view

On n’est jamais trop prévoyant, ironise-t-il.

Il vaut mieux, en effet.

L’agence de presse mondiale Reuters écrivait le 11 septembre 2024 que les États-Unis envisageaient de fournir à Kiev des missiles de croisière qui pourraient permettre de mener des frappes plus en profondeur sur le territoire russe. Immédiatement, la Russie rétorquait qu’elle considérera les États-Unis et leurs alliés comme des cobelligérants s’ils permettent à l’Ukraine d’utiliser des missiles à longue portée contre son territoire. Le président russe, Vladimir Poutine a précisé : «Bien entendu, cela changera considérablement l’essence et la nature même du conflit. Cela signifiera que les pays de l’OTAN, les États-Unis et les pays européens, sont en guerre contre la Russie». Il annonçait que la Russie prendrait des «décisions appropriées» en fonction des menaces pesant sur le pays, compte tenu de la «nouvelle nature de ce conflit ». (1) et (2)

L’escalade n’est pas que verbale. Selon des organes de presse américains et britanniques, l’Iran a déjà livré à la Russie des missiles à moyenne portée de la famille Fateh-110, capables de toucher des cibles situées à une distance de 300 à 700 kilomètres. On avait déjà vu que ces deux pays coopèrent dans la production de drones kamikazes Shahed-136, utilisés pour attaquer l’Ukraine.

Et rappelons qu’en marge du sommet de l’OTAN, qui s’est tenu début juillet à Washington, les États-Unis ont annoncé leur intention de stationner à partir de 2026 des missiles longue portée (supérieurs à 5.500 km) en Allemagne.

Et pour jeter encore plus d’huile sur le feu, à la mi-août, le New York Times écrivait que la Maison Blanche avait approuvé en mars une nouvelle stratégie nucléaire "hautement confidentielle": il s’agit de se préparer à "d'éventuels défis nucléaires", à savoir des "confrontations de la part de la Chine, de la Russie et de la Corée du Nord".

Cela, c’est la rhétorique des puissances de ce monde alors que sur le terrain, des centaines de civils, en plus des soldats, meurent ou sont blessés, perdent leur logement et leurs capacités de gagner de quoi vivre. Ces victimes paient le prix d’un rapport de forces absurde entre puissances qui veulent assurer envers et contre tout leur mainmise sur la partie du monde qu’elles se sont réservées.

Les crimes des militaires

S’il est hautement improbable que les États-Unis lancent une guerre nucléaire avant les élections présidentielles, ils poursuivent leur guerre en sous-main, approvisionnant en armes le régime de Kiev, pourtant de plus en plus déstabilisé et manquant de soldats pour poursuivre ses combats.

De la même manière, les États-Unis poursuivent leur aide militaire et financière au gouvernement israélien malgré les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par celui-ci à l’encontre du peuple palestinien et ce, depuis des décennies. Le gouvernement actuel protège sans cesse les soldats de son armée qui commettent ces crimes et s’en vantent sur les réseaux sociaux, en toute impunité.

Les militaires sont rarement poursuivis devant les tribunaux pour des faits horribles commis pendant les guerres. Tout récemment, l’Australie s’est illustrée en retirant leurs médailles à des commandants d’unité accusés de crimes de guerre pendant la coalition internationale en Afghanistan. "Une enquête officielle a révélé que sur cette période de onze ans, les forces spéciales australiennes ont "tué illégalement" 39 civils et prisonniers en Afghanistan, notamment en les exécutant sommairement lors de rituels d'initiation." Le rapport préconise tout de même "qu'une vingtaine de militaires soient renvoyés devant la justice, que les familles des victimes soient indemnisées et que l'armée procède à une série de réformes." (3)

Mais que peut-on attendre d’une justice la plupart du temps très clémente envers les militaires fautifs ? On se souvient de la guerre du Vietnam et du massacre de My-Lai où les pires atrocités ont été commises entraînant la mort de 400 civils. Seul le chef du peloton William Calley a été condamné à une peine d’emprisonnement à perpétuité… Il n’a purgé que trois ans et demi en résidence surveillée… Pire, quelques courageux soldats qui tentaient de venir en aide aux victimes ont été accusés de traîtrise et n’ont été réhabilités que trente ans après.

En Israël, de courageux jeunes gens refusant de faire leur service militaire et tuer des Palestiniens sont emprisonnés et dénoncés à la vindicte populaire. (5)

Journée internationale pour la Paix

Plus nécessaire que jamais, ce 21 septembre, aura lieu la Journée internationale pour la Paix (6) sur le thème "Promouvoir une culture de paix". Il s’agit en effet du 25e anniversaire de l’adoption par l’Assemblée générale des Nations Unies de la Déclaration et du Programme d’action sur une culture de la paix.

Selon les Nations Unies, la paix "n'est pas simplement l'absence de conflits, mais est un processus positif, dynamique, participatif qui favorise le dialogue et le règlement des conflits dans un esprit de compréhension mutuelle et de coopération". Exactement ce dont nous avons besoin en ces temps troublés au cours desquels nos représentants politiques européens ont oublié ce que politique veut dire : gestion de la cité et pas sa destruction. Relisons Aristote pour qui, résume Wikipedia, seul l’État est capable d’instaurer une contrainte qui a pour but la justice ; avec la cité en effet, la violence fait place à l’État de droit. Et puisque le droit est la règle de la communauté politique, "la justice est donc une valeur politique ; or c’est l’exercice de la justice qui détermine ce qui est juste". Le droit, cet ordre établi par la communauté politique entre ses membres, est à l’origine des vertus morales. La cité permet ainsi à l'individu d'atteindre sa perfection. Toute association politique exige les vertus de sagesse et de justice : elle repose sur des bases éthiques, car "sans la vertu, l’homme est l’être le plus pervers et le plus féroce, le plus bassement porté vers les plaisirs de l’amour et du ventre."

Cherchez l’illustration politique actuelle de ces définitions!

Et Aristote de préciser : "Une cité n’est pas une simple communauté de lieu établie pour empêcher les injustices mutuelles et faciliter les échanges [..] Une cité est la communauté de la vie heureuse, c'est-à-dire dont la fin est une vie parfaite et autarcique."

Difficile de transposer ce modèle à notre planète mondialisée et soumise aux prédations les plus insensées par quelques ploutocrates dont l’horizon mental se limite 0 après moi le déluge. Mais la notion de bien vivre, sur une planète qui appartient à tous, humains et non humains, la notion de bien commun s’ajoutent à cette idée du bonheur partagé. Et cela anime bien des populations un peu partout dans le monde. Voilà à quoi aspirent les pacifistes contemporains. Voilà ce qu’ils expriment sous des formes diverses : marches, manifestations, événements culturels…

Notre espoir : la "Journée internationale de la paix a toujours été une occasion pour déposer les armes et observer les cessez-le-feu, souligne l’Organisation des Nations Unies, qui précise, mais elle veut notamment encourager les individus à prendre conscience de l’humanité de chacun, car notre survie en tant que communauté mondiale en dépend."

 

(1) https://12ft.io/proxy

(2) https://www.politico.eu/article/russia-vladimir-putin-war-in-ukraine-missile-strike-deal-britain-keir-starmer-united-states-joe-biden-white-house-summit-nato-iran-diplomacy/

(3) https://www.rtbf.be/article/l-australie-retire-les-decorations-de-commandants-d-unites-accusees-de-crimes-de-guerre-11433250

(4) https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_de_M%E1%BB%B9_Lai

(5) https://www.lemonde.fr/international/article/2024/03/13/en-israel-les-voix-rares-des-jeunes-qui-refusent-le-service-militaire_6221851_3210.html

(6) https://www.collectifpaix.org/

 

Publication originale sur  Entre les Lignes


Cet article est proposé afin d'élargir le champ de réflexion, ce qui ne signifie pas systématiquement caution à l’analyse et aux opinions qui y sont développées. La responsabilité d'activista.be s'arrête aux propos reportés ici. activista.be n'est nullement engagé par les propos que l'auteure aurait pu tenir par ailleurs et encore moins par ceux qu'il/elle pourrait tenir dans le futur. Merci toutefois de nous signaler toute information concernant l'auteure qui pourrait justifier une réévaluation.